Les blochériens se moquent du Conseil de l’Europe mais ne se rendent pas compte des conséquences, estime Ulrich E. Gut, président de l’association Notre Droit.

Parallèlement aux menaces qui pèsent sur les accords bilatéraux entre la Suisse et l’Union européenne, il existe un risque de conflit avec le Conseil de l’Europe. Une expertise menée par le professeur Walter Kälin et son assistant Stefan Schlegel met en évidence que si la Suisse devait décider que la Convention européenne des droits de l’homme n’est plus contraignante, ou seulement partiellement, et que les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) ne seraient par conséquent plus mises en application, le Conseil européen devrait réagir avec ­fermeté. Il s’ensuivrait alors une bataille difficile, sans limites dans le temps. L’appartenance de la Suisse au Conseil de l’Europe, créateur et gardien de la CEDH, perdrait sa légitimité.

Le 11 décembre 1962, Friedrich T. Wahlen, conseiller fédéral PAB (actuellement UDC), avait plaidé devant le Conseil national en faveur de l’entrée de la Suisse dans le Conseil de l’Europe: ce dernier serait l’unique plateforme capable de traiter les dif­férends entre la CEE et l’AELE. Et aujourd’hui? Dans son rapport de politique extérieure 2013, le Conseil fédéral écrit ceci (page 1036):

«Pour la Suisse, le Conseil de l’Europe revêt une double im­portance: d’une part, les valeurs qu’il défend (droits de l’homme, démocratie et Etat de droit) sont également inscrites dans la ­Constitution fédérale, ce qui lui permet d’apporter son expérience à l’institution strasbourgeoise. D’autre part, les standards élaborés par le Conseil de l’Europe constituent pour l’ensemble des pays membres, y compris la Suisse, des jalons de référence dans tous les domaines dans lesquels il est actif. La plateforme de dialogue que constitue le Conseil de l’Europe permet à la Suisse de participer à l’élaboration de normes juridiques européennes contraignantes telles que les conventions. Depuis toujours, la Suisse attache une importance particulière à ces dernières et participe activement à leur élaboration.»

La plupart des membres suisses de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe estiment également que le Conseil de l’Europe est utile à la Suisse.

Les blochériens se moquent du Conseil de l’Europe, comme ils se sont moqués de l’Union européenne avant le 9 février. Le 16 mai 2014, le conseiller national UDC Hans Fehr a déclaré au quotidien 20 minutes: «Certains bureaucrates et fonctionnaires européens vont sûrement ouvrir leur gueule – mais le peuple européen sera de notre côté

La Suisse collabore activement aux réformes nécessaires de la ­jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Mais, évidemment, cela n’intéresse pas la partie adverse, qui préfère attaquer au moyen de jugements scandalisés, incompréhensibles sans une bonne connaissance des faits. Contre de telles polémiques, il faut recentrer le débat sur les véritables enjeux.

L’offensive contre l’espace européen des droits de l’homme se heurtera à une forte opposition. Car ce dernier protège les Suisses et les Suissesses de l’étranger: qui peut être certain qu’il ne sera jamais emprisonné suite à une fausse accusation ou à un malentendu? Il devient alors vital que le pays hôte de la Convention européenne des droits de l’homme et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme veillent au grain. En soutenant ceux qui refusent de respecter la Convention européenne des droits de l’homme et la Cour de justice commune – et non étrangère –, la Suisse agirait à l’encontre des intérêts de ses citoyens et citoyennes. En outre, elle mettrait en danger sa sécurité en tant que petit Etat, car les Etats qui ne respectent pas les droits de l’homme en leur sein se montrent également plus agressifs vis-à-vis de l’extérieur.

Ici vous trouvez plusieurs d’informations.

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